Vore Gore est une anthologie centrée sur la voraphilie ou vorarephilie, une paraphilie où l’excitation nait de l’idée de manger, le plus souvent entier et vivant, un individu ou d’être mangé par lui, voir même d’être un “simple” observateur d’une personne en dévorant une autre.
Avec un tel sujet il y avait donc matière à attendre un métrage radical et outrancier, surtout avec un instigateur comme Domiziano Cristopharo entouré de collègues et amis réalisateurs dont certains bien connus des amateurs de cinéma extrême : outre Domiziano, nous retrouvons Mikel Balerdi, Emanuele Marchetto, Poison Rouge, Patrick Fortin, White Gardenia, Dario Almerighi, Lorenzo Dante Zanoni et Irene Jones Baruffetti.
Vore Gore se compose donc de 8 actes articulés autour du fil rouge fort bien nommé Mouth, réalisé par Mikel Balerdi, où une bouche annonce le titre de chaque segment à venir.Le premier, Sweet as Honey d’Emanuele Marchetto, nous présente un apiculteur qui, pendant ses séances masturbatoire, fantasme d’être dévoré par lui même. Une entrée en matière plutôt “douce”, à la réalisation carrée qui prépare le terrain pour la suite des “hostilités”.
On rentre ensuite dans le dur avec Finger Licking Good, réalisé par Lorenzo Dante Zanoni, l’un des segments les plus “hard” de Vore Gore. Nous suivons un jeune homme qui, après avoir visionné un porno, rêve d’une séance méticuleuse d’autodestruction : arrachage d’un oeil, puis de ses doigts, il ira même jusqu’à se trancher la langue et le pénis qu’il utilisera pour forniquer avec la bonde de l’évier de sa salle de bain. Lorenzo Dante Zanoni nous livre un segment stylé et brutal qui profite des effets spéciaux fort réussis de Domiziano Cristopharo.
Nous enchaînons ensuite sur Please, not in My Mouth de et avec Poison Rouge où cette dernière, en prenant son bain, a des visions d’un homme torturé par ses soins. Outre le plaisir de retrouver Poison Rouge devant et derrière la caméra, Please, not in My Mouth dégage une belle énergie.
Italian Ladies do it Better de et avec Irène Jones Baruffetti, calme un peu le jeu avec un segment qui s’éloigne du gore frontal de ses 2 prédécesseurs : une dessinatrice de mode reçoit l’appel d’une maison de couture qui lui propose un emploi, sous réserve d’arriver à concevoir une robe originale. Chacune de ses tentatives essuyant un refus du recruteur, elle finit par rater cette opportunité de travail. Cet échec lui fera perdre la raison, mais dans le même temps lui permettra de créer une robe comme on en a jamais vu. Irène Jones Baruffetti fait preuve d’un réel talent dans sa réalisation, mais également en tant qu’actrice, et son segment se montre aussi soigné qu’interessant.Après cet interlude nous revenons dans le brutal avec Infernal Gluttony 2 de Patrick Fortin. Le réalisateur canadien nous offre un véritable festival de gore avec son cannibale à l’appétit d’ogre qui dévore tout ce qui lui tombe sous la main, y compris, in fine, lui-même. Un segment méchamment réjouissant, résolument fun et dont l’aspect “crado-rigolo-système D” ne fait qu’ajouter au charme. Un petit coup de coeur pour ce Infernal Gluttony 2 qui dans son gore outrancier et bricolé a, parfois, comme des réminiscences d’un Bad Taste.
Le 6ème segment, Yummy Fur, va nous éloigner de l’extrême simulé pour nous faire plonger dans celui bien réel : Cherokee Nevin, une performeuse, va nous présenter un numéro de masturbation jusqu’au sang avec des ciseaux, pour finir par se trancher une des lèvres du vagin. Un segment étrange, gonzo, cru et malaisant, que l’on doit à White Gardenia, pseudonyme du performeur et musicien Daniel Valient qui s’est, notamment, illustré dans un des segments de l’anthologie XXX Dark Web.
Arrive ensuite Stretching de Domiziano Cristopharo qui, avec son fidèle scénariste Andrea Cavaletto, nous offre une histoire déconcertante avec cet homme obsédé par les cavités et qui ressent le besoin de se faufiler dans des endroits trop exigus pour lui. Fortement déconseillé aux claustrophobes et contemplatif en diable, Stretching s’éloigne donc du thème de la voraphilie. Domiziano, comme à son habitude, rend un travail sérieux, abouti, et riche en idées visuelles. Vore Gore se clôture avec The Egg de Dario Almerighi où un homme enterre un oeuf en pleine forêt d’où va émaner une femme qu’il va ensuite assassiner, de ses entrailles apparaîtra un nouvel oeuf qu’il ingérera. Abordant la voraphilie par le prisme de la symbolique, The Egg est très réussi techniquement et doté d’une fort belle photographie.
Le film à sketches est toujours un exercice difficile, encore plus quand interviennent différents réalisateurs dans le processus de création. Pour arriver à un tout un tant soit peu cohérent et tenter de gommer les différences trop visibles, il faut souvent brider ou uniformiser le travail de chacun. Vore Gore n’essaye justement pas de le faire, et l’ensemble se montre extrêmement disparate avec des segments ne présentant pas tous le même attrait technique et/ou artistique. Paradoxalement de ce défaut émerge une qualité : la liberté dont a profité chaque réalisateur sur ce projet. Vore Gore est un enfant avec plusieurs géniteurs où chacun a eu l’opportunité de lui offrir une part de son identité. En résulte une anthologie en forme de montagne russe, soufflant le chaud puis le froid, mais qui dans sa globalité mérite clairement le coup d’oeil.
Vore Gore
Année: 2021 ¦ Pays: Royaume-Uni, Italie, USA ¦ Durée: 87mn
Réalisateurs: Mikel Balerdi, Emanuele Marchetto, Lorenzo Dante Zanoni, Poison Rouge, Domiziano Cristopharo, Patrick Fortin, White Gardenia, Dario Almerighi, Irene Jones Baruffetti
Genres: Horreur, Gore/Extrême, Déviant/Trash, Sketches/Anthologie
Acteurs: Emmanuel Trotto, Poison Rouge, Simone Avincola

